Depuis 2022, j’explore l’eau du Rhône à travers la notion de divagation — humaine, animale et fluide. En observant le fleuve, ses couleurs et ses mouvements, j’interroge la mémoire de l’eau : ce qu’elle transporte, ce qu’elle efface, ce qu’elle dépose. Mon travail mêlant films, photographies et gravures cherche à révéler les métamorphoses du fleuve et le dialogue discret qui s’instaure entre le courant, les corps et les traces que nous y laissons.

Divagations
Dans mon diptyque vidéo Divagations, j’invite à une immersion où un personnage nage sous l’eau, semblant converser avec le Rhône. L’image devient un espace de dérive mentale : le regard se laisse happer par le flux, les couleurs et les formes mouvantes qui apparaissent comme des réminiscences, des fragments de mémoire fluide.
Projection du film divagations à l'Espace photographique du Grand Colombier
Les larmes d'Ondine
Avec Les Larmes d’Ondine, je poursuis cette exploration dans une dimension poétique et légèrement dystopique, où corps humains et animaux, mouvements liquides et paysages inversés s’entremêlent jusqu’à une inondation traversée par les larmes d’Ondine. Cette eau devenue mémoire me permet d’interroger l’avenir de nos relations au vivant.

CLIQUER SUR L'IMAGE POUR VOIR LE FILM LES LARMES D'ONDINE 

La part fluide du monde
Je prolonge également l’univers poétique, fictionnel et utopique des Larmes d’Ondine dans un travail photographique La part fluide du monde. À travers des images où se mêlent corps, reflets, traces aquatiques et transformations de la lumière, j’explore ce que pourrait être un monde réinventé autour d’une Ondine contemporaine — à la fois humaine, animale et fluide. Ces photographies constituent une extension de la fiction : elles en amplifient les échos, déplacent les frontières du réel et rendent visibles des formes de coexistence encore imaginaires. Elles me permettent de tisser un récit visuel où l’eau n’est pas seulement un élément, mais une mémoire vivante, un guide et une projection vers l’avenir.
En parallèle de mes films, je développe une recherche matérielle qui relie photographie, gravure et expérimentation. Je creuse, raye, incise, imprime : autant de gestes qui évoquent la manière dont l’eau creuse son lit, façonne ses rives et écrit une histoire dans la matière du monde. À travers ces pratiques, je questionne la trace — ce qui demeure, s’efface ou se transforme — comme point d’appui pour imaginer un futur où humains, animaux et végétaux coexistent dans une logique de coopération plutôt que de hiérarchie. Mes travaux récents sur l’animalité s’appuient notamment sur les observations que je mène dans les passes à poissons et au contact de la vie aquatique du Rhône.
Dans mes expositions, je fais dialoguer matières, transparences et textures pour incarner les reflets, la lumière et les strates du temps. Gravures et photographies s’entrecroisent : abstractions d’eau imprimées en piezographie, tirages monochromes, épreuves argentiques que je creuse pour ouvrir des zones vacantes, véritables respirations.
Je travaille aussi sur des supports translucides — rhénalon, papiers très fins ou fibres végétales comme le bambou — où la lumière traverse les couches et révèle les empreintes, les creux, les gaufrages à peine visibles. Ce passage de la lumière devient pour moi une métaphore de la traversée des époques, comme si les images portaient en elles la mémoire lente du fleuve.
L’ensemble de ces gestes compose un univers immersif où installations vidéo et surfaces gravées forment un même territoire sensible. Divagations est pour moi à la fois une démarche et un espace poétique : un lieu où chaque reflet, chaque vibration, chaque trace gravée prolonge la présence vivante, changeante et mémorielle du Rhône — et où se dessine, en creux, mon utopie ondine, une manière de projeter un avenir à réinventer.

You may also like

Back to Top